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Interview de Joseph Marc Bazié: les groupes djihadistes sont dans une logique d’asphyxier les grandes villes …

 


 


 

Au pouvoir depuis début octobre 2022, le chef de l’état burkinabè, Ibrahim Traoré, a rappelé les origines du terrorisme au Burkina, dû essentiellement à une mauvaise gouvernance. <<j’ai marché pour traverser le Sahel (…..) il n’y a rien là-bas. Qu’avons-nous construit ? Qu’avons-nous fait de sérieux  dans cette zone ? Qui en est responsable ? C’est nous>>, a décrit Ibrahim Traoré, le 11 novembre 2022, lors d’une rencontre avec les partis politiques et de la société civile.

L’analyste politique Joseph marc BAZIE, porte un regard critique sue les propos du président. Suivons-le dans cette interview.

 

 

Togo Scoop Info: Est-ce que vous êtes conscients que le territoire est presque perdu ?

Joseph Marc BAZIE : Nous savons que la question du terrorisme est une menace sérieuse depuis des années mais allez jusqu’à affirmer que le territoire est perdu, je dirai non. Le territoire n’est pas perdu. Certes, il y a des zones où l’ennemi s’est solidement installé avec la complicité des populations locales, parce que sous le régime du président Kaboré il y avait une complaisance dans la lutte. On notait un manque de sérieux dans la lutte et on pensait même qu’on n’avait pas une armée.  Ce qui a rendu la lutte très compliquée. Mais aujourd’hui avec le régime Traoré, on assiste à une réorganisation de l’ossature militaire et avec l’appui des Volontaires pour la Défense de la Patrie (VDP), les choses pourront évoluer autrement. 

 

Togo Scoop Info: « Les gens meurent ailleurs  mais à Ouagadougou on fait la fête ». Que pensez-vous de ce propos d’Ibrahim Traoré ?

Joseph Marc BAZIE : Ces mots sont trop forts mais cela dépeint la réalité de la situation. Ce n’est pas seulement à Ouagadougou,  c’est partout dans les grandes villes du Burkina Faso. Même actuellement il y a des gens dans ce pays pour qui le terrorisme est un jeu, ils ne mesurent pas la gravité de la situation.  Comparaison n’est pas raison a-t-on l’habitude de  dire mais si on veut faire une analyse de la situation,  les populations des grandes villes vivent comme celles de Kaboul en Afghanistan.  Lorsque les talibans occupaient les villages à tour de la capitale, c’était la fête à Kaboul. Nombreux étaient ceux qui ne croyaient pas que cela pouvait arriver dans la capitale. Malheureusement dans leur avancée le 15 août 2021, la capitale est tombée entre les mains des groupes extrémistes et  vous avez vu la débandade qui s’en est suivie. Aujourd’hui qui dirige l’Afghanistan, ce sont les talibans, ils imposent leur loi. Donc quand le président affirme qu’à Ouagadougou les gens font la fête tandis que dans les provinces d’autres meurent de faim parce que ces localités sont sous blocus djihadistes, c’est tout à fait vrai. On pourrait même dire que c’est l’insouciance totale pourtant les groupes djihadistes en observant leur mode opératoire sont dans une logique d’asphyxier les grandes villes avant d’agir. Vous savez que le ravitaillement des grandes villes  en produits agro-pastorales viennent des provinces donc il y  a urgence d’agir ensemble,  voilà là tout le sens du message du Président Traoré.  

 

Togo Scoop Info: Dans sa déclaration, il affirme que le pays n’est pas pauvre. Quel est votre point de vue ?

Joseph Marc BAZIE : Le colon nous a fait croire que nous avons hérité un pays pauvre et même que toute l’Afrique est pauvre. On chante cela tous les jours et on l’enseigne même à nos enfants. Donc que voulez-vous que les gens disent? Cela est ancré dans la mémoire et transmise de génération en génération.  Hors il est faux d’affirmer que le Burkina est pauvre. Le pays est très riche et dispose encore des ressources inexploitées. Il y a beaucoup de pays dans le monde qui n’ont pas le quart de nos richesses mais qui sont très développés que nous. Le problème dans notre pays et même partout en Afrique c’est la mauvaise gestion  de nos ressources qui pose problème.  Au-delà de ça, il y a la malhonnêteté et la complicité de nos dirigeants politiques qui ont presque tout vendu aux firmes occidentales moyennant leur protection au pouvoir. Il faut seulement prendre le secteur minier pour en savoir. Depuis 2010, l’or est devenu le premier produit d’exportation du pays mais qu’est-ce qui a changé dans l’assiette du burkinabè?  On se rend compte que tout devient pire pendant que les sociétés minières fleurissent de partout. C’est en Afrique que   vous verrez des dirigeants aller prendre des crédits au nom de leur pays et détourner ce même argent pour aller placer dans des comptes bancaires en Europe, et l’excuse simple qu’on trouve, le pays est pauvre. Il faut changer cette mentalité et arrêtez de la transmettre à nos enfants.  Moi je suis un professeur d’Histoire Géographie, je connais bien les potentialités dont dispose notre pays et je ne dis pas à mes élèves que le Burkina Faso ou l’Afrique est pauvre. Je leur dis la  vérité et je prends des exemples à l’appui. Voilà le Qatar qui organise la coupe du monde à partir du 20 novembre, faites un recul de 50 ans en arrière pour savoir où  était le Qatar, pendant ce temps nous, nous fêtons nos 62 ou 63 ans d’indépendance. Il nous faut  changer de paradigme.  

 

Togo Scoop Info: Lors du conseil des ministres, le chef de l’état, président de la transition, Ibrahim Traoré, décide de garder son salaire de capitaine. Quelle appréciation avez-vous à ce propos ?

Joseph Marc BAZIE : La décision du président est très salutaire. Cela prouve que ce n’est pas le pouvoir qui l’intéresse comme il l’a dit lui-même au début de sa prise du pouvoir. Il était indigné de la gestion du pays et dans l’état  chaotique où le pays partait.  Voilà pourquoi il a pris ses responsabilités avec certains de ses camarades. Nous l’avons dit plus haut, il faut changer de paradigme et le président actuel est sur la  bonne voie donc il doit se donner les moyens d’atteindre son objectif car ce pays est trop pourri et les ennemis sont nombreux. Après Thomas Sankara on n’avait pas vu un président qui a décidé de garder son salaire de militaire une fois au pouvoir. La gouvernance par l’exemplarité est la meilleure.  Vous verrez bientôt ce que plusieurs burkinabè feront pour soutenir la lutte. Il y a des gens qui ont les moyens et la volonté de bien faire mais quand ils pensent que leur aide sera détournée à d’autres fins ils préfèrent ne rien faire. Mais si la direction est bonne, la roue tournera. Nous tirons notre chapeau au Président et aussi à son premier ministre qui ont la même vision. Puisse Dieu leurs protéger dans cette tâche si lourde pour le bien de tous.

 

Togo Scoop Info: Les ministres ont également décidé de consacrer 50% de leurs salaires du mois de novembre à la caisse nationale de solidarité au profit des personnes en difficulté notamment les personnes déplacées internes. Qu’avez à dire à ce sujet ?

Joseph Marc BAZIE : Les ministres ont suivi l’exemple du président. Si le président lui-même fait des efforts en sacrifiant son salaire pour le bien du pays, pourquoi pas les ministres ?  Tout dépend de la tête,  si elle est bonne, la queue suit seulement mais si la tête est mauvaise alors la queue sera mauvaise. On a vu sous le régime Damiba où les salaires ont été bombardés à un niveau et pendant ce temps on demande sacrifice au peuple. C’est contradictoire. Le sacrifice vient du sommet d’abord et le peuple s’aligne. Vous serez étonnés de ce peuple, croyez-moi.  C’est un peuple merveilleux. Les gens se mettront à la tâche et vous verrez les dons. Félicitations aux ministres qui ont décidé aussi de suivre l’exemple du président.  Maintenant à chaque ministre d’être efficace dans son domaine car cela est important aussi. 

Togo Scoop Info: Quel est votre mot de fin?

Joseph Marc BAZIE : Mon mot de fin, c’est emprunté les mots du Président qui disait que tout est urgent. A l’heure actuelle tout est vraiment urgent. Les problèmes sont nombreux et les attentes également.  Donc c’est un gouvernement qui doit aller à la vitesse de la lumière. J’ai l’habitude de dire à mes élèves que je pleure les présidents qui viendront au pouvoir après Roch Marc Christian Kaboré,  parce que ce peuple a longtemps attendu, et il ne peut plus être patient. Sa patience est au bout donc tout dirigeant qui viendra se complaire dans le luxe du pouvoir partira en plein midi. Vous avez vu les derniers résultats du RGPH de 2019, regardez le pourcentage des jeunes, si des mesures idoines ne sont pas prises, la rue sera le maître de gouvernance. Vous avez vu les dernières manifestations des jeunes après la prise du pouvoir par le président  Traore et ces manifestations continuent toujours. Prenez l’exemple des manifestations du 18 novembre devant le camp Kamboinsin et l’ambassade de France pour exiger le départ des forces françaises. Il y a l’émergence d’une nouvelle mentalité, voilà pourquoi  chaque ministre est interpellé et doit mesurer l’ampleur de la responsabilité qu’il porte. Aussi chacun de nous doit se mettre à la tâche. Aussi vous voyez que le gouvernement KYELEM à enregistrer deux démissions suite aux manifestations donc c’est un message fort. Aujourd’hui nous ne devons plus demander qu’est-ce que l’État doit faire pour moi mais qu’est-ce que moi je dois faire pour mon pays?  Nous avons tous une grande responsabilité à jouer et nous devons nous mettre à la tâche immédiatement car il y a eu trop de temps perdu. 

Je vous remercie.

 

 

Interview réalisée par Yaovi AGBEGNIGAN

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