Les autorités togolaises ont annoncé le démarrage à partir de ce 14 août 2023 du port obligatoire de casques pour les usagers à deux roues de la route (conducteur et passager). Cette mesure est la preuve que ces dernières ont à cœur l’intégrité physique de la population et particulièrement des usagers de la route à qui elles veulent éviter des accidents mortels. Mais se soustraire d’un accident ne peut seulement se résoudre au port du casque ; de même la responsabilité dans la survenance de celui-ci ne peut être imputée uniquement qu’aux seuls usagers de la route. Plusieurs facteurs interviennent dans la survenance d’un accident et l’Etat a aussi sa part de responsabilité dans celui-ci surtout au Togo.
De nombreux facteurs interviennent dans un accident de la route et la responsabilité de l’Etat n’est pas totalement dégagée dans la plupart des cas, bien au contraire.
Au Togo, l’une des causes des décès des accidentés de la route est la faible dotation en matériel de protection civile. Le pays dispose de très peu de moyen en ambulance ou véhicule de sapeurs-pompiers. Le territoire est inégalement couvert. Même à Lomé des disparités existent.
PAS D’AMBULANCE NI DE VEHICULE DE SAPEUR-POMPIER SUFFISANTS
Le bon sens aurait voulu qu’au moins toutes les communes soient dotées de ces moyens. Mais tel n’est pas le cas. Lomé qui fait office de mieux loti en la matière est aussi exsangue en couverture en raison de sa forte concentration humaine. Les banlieues de la capitale ne disposent ni d’ambulance ni de véhicules de sapeurs-pompiers. Quand un accident survient par exemple à Togblekopé, Baguida ou encore à Sanguéra, il est presque difficile de voir l’accidenté être amené à l’hôpital dans une ambulance. Le recours est fait le plus souvent dans ces cas aux taxis ou taxi-motos avec tous les risques que cela comporte.
Les principaux carrefours de la ville sont également dépourvus d’ambulance ou de véhicule de sapeurs-pompiers et quand subvient un accident, il est difficile pour ces véhicules lorsqu’ils en existent de se frayer un passage depuis le centre-ville jusqu’au lieu de l’accident surtout aux heures de pointe. Conséquence, ils mettent plusieurs dizaines de minutes avant d’atteindre le lieu de l’accident. Autrefois, sont positionnés à certains carrefours de Lomé notamment GTA, rond-point CimTogo des véhicules de sapeurs-pompiers. Aujourd’hui, cette délocalisation a laissé place aux voitures militaires.
Mais une fois ces ambulances parviennent au lieu de l’accident, les équipements pour les premiers soins à bord font défaut.
LE DISPOSITIF D’UNE AMBULANCE
La logistique d’une ambulance médicalisée se compose du dispositif mobile d’oxygénothérapie comprenant au moins deux bouteilles d’oxygène munies d’un débitmètre gradué en litres d’oxygène par minute, faisant corps avec un mano détenteur. D’un scope qui est un écran qui permet de suivre en permanence les constantes comme le rythme cardiaque, le taux d’oxygène dans le sang, la tension artérielle ou encore la température. D’un insufflateur manuel homologue, un dispositif mobile d’aspiration de mucosité, d’une fixation permettant de recevoir une perfusion de 0,5 litres.
Le véhicule est doté aussi de bandes élastiques type valpeau, de compresses de gaze stérile, de pansement stérile absorbant (dit américain), de rouleaux, de ruban adhésif parapharmaceutique, de drap stérile (tissu ou non tissu, ou drap isotherme), de champ stérile, de paires de gants stériles usage unique, de solution antiseptique bactéricide non iodé, en conditionnement d’origine, de clamp de BARR stérile usage unique, de couverture isotherme, des attelles pour membres inférieurs et supérieurs, de colliers cervicaux anti flexion : petite, moyenne et grande taille. Des médicaments d’urgence comme sérums salés ou glucosés, un extincteur, le défibrillateur et des accessoires comme une paire de ciseaux universels “bouts mousses”, une pince à écharde, des canules oropharyngées et de bouche à bouche, un rasoir de sûreté, une lampe électrique à pile, le sucre en morceaux, des sacs poubelles. Toute chose qui demeure un luxe ici. Pour nos ambulanciers, même s’ils en ont entendu parler c’est dans les livres.
Quant à l’équipe à bord, elle doit être composée d’un chauffeur qui doit avoir comme formation minime le secourisme, un médecin urgentiste, un infirmier. Toute chose qui n’existe pas ici.
Pour suppléer au manque de moyen de l’Etat, ce dernier pourra ouvrir le secteur aux opérateurs économiques privés qui ont les moyens d’investir dans l’ambulance et le véhicule de sapeur-pompier.
Si l’accidenté dans ces conditions arrive par miracle à l’hôpital, il n’est pas au bout de ses peines. Il ne pourra pas bénéficier de premiers soins car même étant inconscient on exigera de lui d’abord le paiement des frais de prise en charge. Dans ces conditions des vies ont trépassé alors qu’on pouvait les sauver. Les affaires sociales ne le sont que de nom. Elles ne connaissent pas l’indigent, ni la veuve ou l’orphelin.
ABSENCE DE FEU DE SIGNALISATION
L’autre cause d’accident sur nos routes est l’absence de feu de signalisation sur les principales artères de la ville. Dans ce sens, l’exemple illustratif est les nouvelles voies de Lomé. Il est inconcevable que plusieurs mois après l’ouverture de certains tronçons en l’occurrence le tronçon Attikoumé-Douane Adidogomé qu’il (même si on estime qu’il n’a pas été officiellement réceptionné) ne soit pas doté de feux tricolores, ce qui est source d’accident parfois mortel surtout au niveau du grand carrefour d’Attikoumé. Même si les forces de sécurité essaient de remplacer l’absence de feu tricolore, elles ne peuvent le faire qu’à temps partiel.
DEFAUT DE LUMIERE
Une autre cause qui n’est pas éloignée du précédent est le défaut de lumière sur nos voies. Le tronçon Douane Adidogomé-Segbé est un cas palpable. Il est inconcevable que cette voie malgré son étroitesse tant décriée qu’elle soit en plus non éclairée la nuit malgré que tout est mis en place pour l’éclairage. Dans un pays où les citoyens paient l’éclairage public, que des accidents se produisent sur des routes non éclairées alors que des lampadaires sont installés, dans un pays normal, les citoyens sont en droit de poursuivre l’Etat pour négligence.
LIMITATION DE VITESSE
Normalement dans les grandes agglomérations comme Lomé, même s’il peut y avoir d’accident de circulation, les décès peuvent être évités si tous les usagers respectaient la limitation de vitesse. Au centre-ville de Lomé par exemple la vitesse autorisée ne doit pas dépasser 50km/h. Des radars doivent être installés pour dresser des contraventions à ceux qui outrepassent la vitesse autorisée. Il en sera de même pour le test d’alcoolémie.
Non seulement l’Etat n’est pas regardant sur la limitation de vitesse puisque n’a pas installé des radars sur les voies pour la vérification mais en plus ces agents positionnés sont plus préoccupés à racketter les usagers qu’à appliquer les règles du code de la route. Le même Etat qui est incapable d’appliquer sa décision interdisant aux forces de sécurité de racketter les usagers de la route comme le fait le Bénin, est plus regardant à contraindre les usagers à porter de casques. Ces forces de sécurité s’y donnent à cœur joie dans l’application de cette mesure car sachant que les contraventions n’iront pas dans les caisses de l’Etat.
RETRAIT DES POINTS SUR LE PERMIS DE CONDUIRE
Un chauffeur peut aujourd’hui être responsable d’un accident et prendre encore sa voiture le lendemain pour causer un autre accident s’il n’est pas interpellé sans que cela n’ait d’incidence sur son permis de conduire. Les chauffards sont laissés à la providence.
Il faut que l’Etat réfléchisse sérieusement à la délivrance et au suivi des permis de conduire. Que tout conducteur en indélicatesse avec le code de la route se voit retirer des points sur son permis de conduire ou imposé des restrictions au moment de son renouvellement. Tant que l’auteur d’un accident s’il n’encoure pas des peines privatives de liberté et sans préjudice sur son permis de conduire, il ne mesurera pas la gravité de son geste. Il le reproduira à la moindre occasion.
L’ASSURANCE MALADIE UNIVERSELLE
L’assurance maladie universelle doit être étendue et rendue accessible aux couches défavorisées. Elle favorisait l’accès aux soins à tous et éviterait des décès dans les centres de santé pour absence de frais de soins. Ainsi tous les citoyens victimes d’accident et disposant d’assurance, il sera plus aisé aux services de secours de les acheminer dans les centres de santé le plus proche même si celui-ci est une clinique. L’assurance supportera le coût du traitement. Très souvent des blessés sont transférés sur une longue distance pour aller dans des centres hospitaliers publics succombent alors qu’à proximité il y a des cliniques qui peuvent les prendre en charge.
En somme, si l’Etat joue sa partition sur ces points, il réduirait les cas d’accident mortel dans le pays à associer au port de casque. Même si dans la pratique cette mesure sera difficile à appliquer sans subvention des casques pour une population paupérisée. Et surtout que dans les pays où le port de casque pour le conducteur et le passager a réussi sont des pays où la moto est utilisée à titre personnel. Contrairement au Togo où la moto est utilisée comme transport en commun. C’est toute la difficulté de la mise en œuvre de la mesure alors il faut user de la pédagogie, de la sensibilisation pour amener la population à comprendre que c’est avant tout son intégrité physique qu’il s’agit.
Albert AGBEKO
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